lundi 29 avril 2013

Melting-pot


Je fais parfois un tour dans le village pour saluer et discuter avec les femmes et avec leurs époux quand ils s'y trouvent. En passant voir l'une d'elles, un des hommes qui se trouvaient là se met à me poser quelques questions sur les familles au Québec, le nombre d'enfants, les divorces... Nous  discutons un peu. L'ambiance est bon enfant. À un moment, il me dit : un canadien comme vous m'a dit qu'ici, au Sénégal, les hommes sont rois. Paraît que chez vous, maintenant ce sont les femmes qui mènent, qui sont les "rois" et que les hommes ne peuvent plus rien décid

Je suis un peu interloquée mais je poursuis en disant qu'au Quebec les femmes ont lutté  pour l'égalité, que souvent hommes et femmes luttent ensemble pour cela et que oui, beaucoup de choses ont changé pour le mieux malgré ce que certains en disent...On poursuit un peu et on se salue, je suis déjà en retard, je dois continuer ma tournée.

Toute seule, je réfléchis à cela : je viens ici pour apprendre et pour pour offrir mon appui, en autant qu'on veuille bien de moi. Je viens aussi dans un objectif d'échanges afin de construire un monde plus égalitaire et plus juste.

Je mesure tout le travail qu'il y a encore à faire chez nous et je suis déçue.

Déçue que des compatriotes reproduisent de pareils clichés, des hommes qui blaguent sur leurs places perdues. Je suis blessée.

Il est triste que nous ne présentions pas la situation du Québec comme un exemple de société où des efforts sont faits pour rechercher la pleine égalité et que ceci a des effets positifs pour tous, dommage et choquant pour une fille comme moi qu'on présente cela comme une sorte de combat. Comme si notre recherche de l'égalité en droits et en faits n'étaient qu'une affaire de gagnant-perdant dans la cuisine ou dans le salon.

La mer

Ai vogué sur l'océan et en pirogue, pas trop loin mais tout de même assez pour en craindre l'immensité et sentir qu'elle peut vous avaler d'un coup. Je ne m'y étais jamais aventurée si loin et encore moins en chaloupe!

Ai vu plusieurs pêcheurs, en pirogue ou à marée basse, lancer ou tirer les filets, filer sur l'onde ou lancer l'ancre sur la plage et tirer l'embarcation, plusieurs hommes étant alors réquisitionnés pour ce travail. Difficile labeur sous un soleil dur comme du fer brûlant.

Ai vu les campements de fortune des guinéens venus pour quelques mois seulement, leurs cases en paille sur lesquelles séchant leurs vêtements. Ils achètent des sénégalais le poisson qu'ils fumeront sur de très très longs fours de ciment alimentés d'immenses tas de bois de ronier posés sur la grève en attendant. Ils le vendront au Burkina  Faso, au Mali, en Guinée. Nous ont invité à prendre le thé, ce que nous fîmes avec bonheur. Peu de mots mais des poignées de main chaleureuses au pied de quelques arbres en bosquet.

Ai vu des dizaines de tas poissons et de coquillages de toutes sortes, posés à même le sable, des échanges de billets, des discussions à la buvette, là où on boit un café touba et où les femmes font frire le poisson pour tromper la faim des hommes. Une activité fébrile de bord de mer jamais vue, jamais imaginée, dont j'ignorais même la possible existence, les longs séchoirs à poisson, les bacs d'eau salée eux-mêmes grugés par  le sel et au milieu de tout ce capharnaüm, la colline de coquillages cassés qui continue de grandir sous les centaines de coques qu'on y brise chaque jour....l'odeur du sel marin... La cohue, les pirogues, les enfants, les petits garçons engagés qui se pressent pour être les premiers à cueillir les fruits de la pêche, de gros bacs en plastique à la main. Totalement surréaliste.

Ici, les femmes font le commerce du poisson. Les hommes vont en mer.

Feu 


Une des femmes du village a vu sa cuisine partir en fumée. Ttrente minutes et il n'en restait plus rien m'a-t-on dit. Personne n'y pouvait rien. Faudra reconstruire avant l'hivernage dans quelques semaines. 
Mais avec quel argent?

1 commentaire:

  1. Je comprend ton désarroi, c'est d'autant plus blessant, que pour nous toutes, ce n'est pas une lutte, c'est le respect mutuel et l'échange. J'ai même connu un crétin fini pour qui le rêve était de trouver une blonde vraiment jeune (15 ans, genre) pour pouvoir la manipuler et en faire une bonne petite épouse soumise et docile. Il avait 24 ans. Ça, ça m'a fait peur. Mais bon. Il y a des imbéciles partout, mais sont-ils obligés d'aller répandre leur machisme ailleurs et de nous faire passer pour des arriérés? allez, c'est l'exception... Enfin j'espère.

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