mercredi 9 octobre 2013

Aux urnes, citoyens?

«Allez voter!» qu'y disent! «Allez voter!»

Ces jours-ci, on n'entend plus que ça : le vote municipal nous sortira de la corruption, fera peur aux bandits de grands chemins, il transformera les dociles citoyens en lions et enfin, les méchants prendront peur et verront bien qui mènent vraiment...

ah oui?
«Allez voter! »
Moi je veux bien - ou pas trop en fait, parce qu'il y a une question derrière ça : voter oui, mais pour qui?

Et surtout pourquoi voter ? Ou encore, voter pour quoi?

Essayez juste un instant, essayez de lever la main,  juste un peu, un petit peu plus haut, essayez de hausser le ton, juste un moment, essayez encore un peu plus et vous verrez qui mène vraiment.

Des exemples, il y en a plein. Un attaché politique qu'on doit convaincre du bien fondé d'une demande citoyenne, à qui on doit rappeler son rôle ( Eh! monsieur ! Tu travailles pour qui, toi? ); un groupe de citoyennes et citoyens se faisant servir l'impératif économique comme raison du développement; un autre groupe qui reçoit réponse laconique que rien ne peut être fait, tous les avis légaux donnant raison au projet, malgré son incohérence évidente et entendue.

Alors maintenant, essayer de protester un peu plus fort. Essayer de faire plus que voter. De lever la voix, de vous mettre en colère. La crise étudiante n'a-t-elle pas démontrer que vous pouvez tout dire tant que c'est fait dans un certain cadre (vraiment ?) et si possible en faisant des ronds-de-jambe?

Je me sens fatiguée tout d'un coup parce que plus les années passent, plus je prends conscience du réel rapport de force, de sa faiblesse actuelle devant tant d'impératifs économiques et politiques, du développement infini et à tout prix, là où les critères financiers pèsent plus lourd que le futur de nos enfants et de l'humanité toute entière... si on se contente de voter.

Chacune, chacun mesure alors ses intérêts, ne veut pas se brûler, tient à préserver ses arrières et certainement ses devants et nous y voilà finalement : on se fait mener en bateau par la majorité de ces citoyens dévoués qui consacrent leur vie à la politique et surtout à réaliser leur ordre du jour, un plus officiel que l'autre, et derrière lequel se cache l'agenda, le caché, celui qui assurera le pouvoir. Le pouvoir.

Je me sens fatiguée parce que de moins en moins prête à négocier, à réformer,  parce que de plus en plus il m'apparait illusoire qu'à force de pourparlers, qu'à force d'intelligence et de raison...Et j'ai soif d'une réelle vigilance citoyenne, celle à bâtir, à construire, je suis affamée d'une réelle parole des gens, ceux en dehors de tout, qui vivent leur ordinaire, loin de toutes formes de contraintes, d'enjeux politiques, de jeux de coulisse.

Rien de plus difficile actuellement et pourtant rien de plus nécessaire face aux mailles d'un filet inextricable.

Je revendique ma pleine parole, l'entière, la menacée, celle qui ne sait que balbutier dans un cri son indignation et qui pourtant sait ce qu'elle souhaite :  plus que le vote, plus que des chefs, plus qu'une démocratie à l'emporte-pièce exercée aux quatre ans, seul moment où la politique a besoin de nous, petits soldats qui nous hâtons le matin à l'ouvrage, croyant dur comme fer qu'on les vaincra tous et toutes, ces salauds.